Fondatrice, en 1922,  de l’Union catholique des services de santé devenue dix ans plus tard l’Union catholique des services de santé et services sociaux (UCSS). Fervente catholique, elle a donné à cette organisation la tâche d’évangélisation des professions d’infirmières et assistantes sociales. Elle a poursuivi cette orientation en créant le Comité international catholique des infirmières et des assistantes médico-sociales (CICIAMS) et le Comité international des infirmières catholiques.

Marie Liron d’Airoles est née le 29 juin 1884 à Saint Hilaire sur Benaize dans l’Indre, seconde d’une fratrie de trois enfants. Son frère ainé, né en 1880, décède d’une méningite à l’âge de quatre ans. Après son retour à la terre, son père, Tony d’Airoles, âgé de 39 ans à sa naissance,  est un propriétaire terrien, au domaine du Pin. Sa mère, Jeanne de Chergé est fille d’un châtelain voisin, épousée en juin 1879,  Du coté paternel comme maternel, sa famille est très catholique ; la sœur de Jeanne de Chergé  est supérieure des Sœurs Auxiliaires des Ames du Purgatoire, elle mourra en Chine en 1913.

Marie Liron d’Airoles passe les dix premières années de sa vie au domaine familial, où sa mère joue pour elle le rôle d’institutrice. Elle ne fréquentera l’école qu’à partir de 1894 : ce sera celle des religieuses trinitaires à Dinard où ses parents viennent passer l’hiver. Ils font également de long séjour à Paris où le frère de son père, Georges d’Airoles est sous gouverneur de la Banque de France. En 1902,  âgée de 18 ans,  elle commence à avoir des activités dans le champ religieux. À Paris elle fait le catéchisme dans le quartier Mouffetard et fréquente un cercle d’études regroupant des femmes tandis qu’à Dinard elle est aux cotés de son père pour s’opposer à l’expulsion des congrégations religieuses. Elle poursuit ce combat en adhérant, en 1904, à la Ligue Patriotique des Françaises, créée en 1902, pour appuyer les candidats catholiques aux élections législatives de 1902. Elu maire, en 1904, de Douadic dans l’Indre son père lui demande d’organiser des œuvres sociales dans cette commune rurale. Elle met en place des soins aux malades, des classes enfantines pour les enfants des hameaux éloignés, une bibliothèque populaire et organise des conférences éducatives. Poursuivant son action médico-sociale, elle ouvre, en 1911 avec une amie anglaise, un petit sanatorium à La Bourboule pour les jeunes ouvrières et organise, entre 1911 et 1914, des colonies de vacances.

À la déclaration de guerre, elle s’engage comme infirmière volontaire à l’hôpital 34 à Le Blanc dans l’Indre. En 1916 elle poursuit son engagement en adhérant à la Société de Secours aux Blessés Militaires. Cette dernière l’affecte, le 31 décembre 1916,  à un hôpital à proximité du front. L’année suivante elle passe le diplôme de la Croix Rouge, C’est cette même année 1917 que décède son père, à l’âge  de  72 ans. L’année suivante elle va soigner les blessés de guerre en Italie à Vicence, dans la région où se sont déroulés d’importants combats.  Pendant toute cette période, elle est marquée par la faiblesse de la foi catholique qu’elle rencontre chez les soldats qu’elle soigne, faiblesse qui la heurte profondément.

À son retour d’Italie elle réside quelques temps au domaine familial du Pin à Saint Hilaire sur Benaize avant d’être envoyée, en 1919, par la Croix Rouge à Taza au Maroc. Sa santé est affecté par le climat de cette ville ce qui la conduit à revenir en France au bout de trois mois. En décembre 1920, elle commence à exercer comme infirmière au sanatorium « La Belle Alliance » à Groslay en Seine et Oise, sanatorium financé par des fonds nord américains.  L’année suivante, en 1921, elle fonde un cercle pour les infirmières catholiques, le cercle porte le nom d’une infirmière catholique, proche du Sillon, Geneviève Hennet de Goutel. Cette dernière faisait partie de la mission sanitaire, envoyée en Roumanie en 1916 par la Société de Secours aux Blessés Militaires ; elle meurt du typhus à Iasi où la mission sanitaire organisait un hôpital pour les malades atteint par l’épidémie de typhus. Victime de cette épidémie, elle meurt en mars 1917.  Pendant six mois ce cercle se réunit régulièrement jusqu’au moment où Marie Liron d’Airoles est opérée, suite à une blessure reçue à l’hôpital d’Amiens en portant un brancard.  Au cours de l’année 1922, elle rencontre le prêtre jésuite Paquet qui s’occupait des unions professionnelles des PTT et des Banques, celui-ci souhaitait fonder une union professionnelle des  infirmières. Et c’est avec l’appui du directeur de l’Action Populaire, le prêtre jésuite Gustave Desbucquois  qu’elle créé l’Union catholique du personnel des services de santé, dont elle est élue secrétaire du comité provisoire.  Cette union vise à regrouper les infirmières catholiques, appelées à témoigner de leur foi. Un appel est lancé dans ce sens : « Nous admirons toutes les sources de dévouement, mais pour nous catholiques, il ne peut pas y en avoir de meilleure, de plus profonde, de plus inépuisable que le haut idéal du christianisme, et nous ne voulons pas le laisser abaisser, ni en nous, ni en notre corps professionnel. »  Cet appel aboutit à la création de l’Union Catholique des services de santé (UCSS) dont Marie d’Airoles devient, en 1923,  présidente, fonction qu’elle exercera jusqu’en avril 1945.

Dans cette période où s’organisent les infirmières catholiques, un processus identique est à l’œuvre chez celles qui allaient devenir assistantes sociales.  Avec l’appui des jésuites de l’Action Populaire, Andrée Butillard et Aimée Novo, fondatrices de l’Ecole Normale Sociale, créent, en 1922,   l’Union des Auxiliaires Sociales (UAS), dont l’objectif est de « regrouper toutes les personnes sortant d’une école donnant une formation exclusivement sociale et de faire reconnaître la spécificité de cette formation par un diplôme ». L’UAS vise, en regroupant les auxiliaires sociales catholiques, à soustraire le social de l’influence du médical et à faire reconnaitre la spécificité du service social. Poursuivant cet objectif au niveau international, Andrée Butillard fonde, en 1923, l’Union Catholique Internationale de Service Social (UCISS). Dans ce climat d’opposition entre le médical et le « social pur », les tensons et, parfois, conflits entre les deux organisations professionnelles catholiques, l’UCSS et l’UAS, seront très forts, notamment quant, en 1933, l’UCSS devient l’Union Catholique des services de santé et services sociaux. Une forte tension existe aussi entre Marie Liron d’Airoles et Léonie Chaptal à propos de la formation des infirmières. Alors que Marie Liron d’Airoles ouvre l’UCSS à toutes, diplômées ou pas, Léonie Chaptal, qui a obtenu la création du diplôme d’Etat d’infirmière et infirmière visiteuse en 1922, , fonde, en 1924, l’Association Nationale des Infirmières Diplômées de l’État français (ANIDEF), association non confessionnelle et ouverte aux seules diplômées.

Dés le moment de la fondation de l’UCSS, Marie Liron d’Airoles organise une campagne d’information et d’adhésion. L’association est déclarée en 1925 et cette même année, sort le premier numéro du Bulletin de l’Union Catholique du personnel des services de santé. Dés 1926, quatre ans après sa fondation, l’UCSS compte 3000 adhérentes. En 1930, l’UCSS  installe son siège au 16 rue Tiphaine  dans le 15e arrondissement de Paris. L’immeuble avait été acheté en 1925 par Marie Liron d’Airoles, sur ses fonds personnels, l’achat avait été suivi de travaux et aménagements. Cette même année 1930, parait une nouvelle publication de l’Union, Pages documentaires, largement diffusée parmi les 7 000 adhérentes, qui constituent une forte majorité des infirmières et assistantes sociales en exercice.  Lors d’une conférence, à Bâle en 1928, réunissant des infirmières catholiques de plusieurs pays, Marie Liron d’Airoles prône la création d’une association internationale de catholiques regroupant les femmes assurant les fonctions d’infirmière hospitalière, d’infirmière visiteuse, de travailleuse sociale. À son initiative se met en place le comité international d’études des associations catholiques médicosociales. Trois ans après, lors du congrès de ce comité d’études à Lourdes en 1933, est fondé le Comité international catholique des infirmières et des assistantes médico-sociales (CICIAMS) présidé par Marie Liron d’Airoles. Elle en quittera la présidence en 1937, elle sera remplacée par une infirmière anglaise Mrs Glanville. L’année 1933 voit également la transformation de l’UCSS en Union Catholique des services de santé et service sociaux. Ainsi le conflit entre le médical et le social qui traverse les professions d’assistante sociale et infirmières visiteuses s’exprime également dans l’existence d’organisations professionnelles catholiques concurrentes.  Mais les lignes de clivage ne sont pas toujours très claires. En parallèle avec l’Union Catholique Internationale de Service Social, Marie Liron d’Airoles fonde à Rome en 1935, lors d’un premier congrès regroupant les représentantes de 28 pays, le Comité International des Infirmières Catholiques qu’elle préside avant d’en devenir secrétaire générale. C’est à l’occasion de cette fondation qu’elle reçoit su pape la médaille « Bene Meretti »  pour son apport à l’Eglise.

Proche de la Confédération Française des Travailleurs Chrétiens (CFTC), elle suscite la création, en 1931, du syndicat CFTC des infirmières et travailleuses sociales, syndicat auquel l’UCSS appelle à adhérer. Ainsi est marquée la distinction entre l’action revendicative portée par le syndicat de l’action évangélisatrice de l’union professionnelle.

En 1939 l’UCSS est au faite de son influence : elle regroupe près de 14 000 adhérentes et Marie Liron d’Airoles reçoit, du pape Pie XI, la médaille « Pro Ecclésia e Pontifice », médaille rarement attribuée à des laïcs. En 1940 elle lance la publication d’une nouvelle revue L’infirmière aux armées qui ne sortira que quatre numéros. Marquant sa prise de distance avec l’État Français, elle fait paraitre clandestinement Pages de vie.

Gravement malade elle abandonne la présidence de l’UCSS en avril 1945 et elle décède, trois mois plus tard le 25 juillet à l’âge de 61 ans, au domaine familial du Pin à Saint Hilaire sur Benaize, là où elle est née.

SOURCES : Marie-Françoise Collière, « Marie de Liron d’Airoles (1884-1945) » La revue de l’infirmière, n° 165, novembre 2010, p. 49-50. — Évelyne Diebolt, « Léonie Chaptal (1873-1937), architecte de la profession infirmière », Recherche en soins infirmiers, juin 2012, n° 109, p. 93-107. — Bruno Duriez, Étienne Fouilloux, Denis Pelletier, Nathalie Viet-Depaule (dir.), Les catholiques dans la République 1905-2005, Paris, Les Éditions de l’Atelier, 2005. — Évelyne Diebolt, Les Femmes dans l’action sanitaire, sociale et culturelle, 1901-2001. Les associations face aux institutions, Paris, Femmes et Associations, 2001. — « Marie Liron d’Airoles  1884-1945  synthèse », Vie sociale, n° 3-4, 1993.

Henri Pascal