Née en 1919 dans une famille catholique angevine, Geneviève Morinière a été élevée dans la foi et décide de s’y consacrer s’engageant dans la congrégation Notre Dame du Travail. Elle fait sa formation d’infirmière et puis d’assistante sociale à l’École Normale Sociale. Elle devient la directrice de cette école en 1961 et y déploiera une formation dynamique, proche du terrain et développera les approches collectives du travail social.

Née le 5 avril 1919 à Saint-Florent-le-Vieil (Maine et Loire), petite ville des bords de la Loire, Geneviève Marie Louise Morinière est la huitième et dernière enfant d’une famille catholique angevine. Elle est décédée à Nantes le 17 janvier 2019 à presque 100 ans.

Son père, Victor Morinière a exercé toute sa vie comme médecin de campagne.

Sa mère Madeleine (née Lusson)  aide son mari dans ses tournées notamment lors des accouchements, et s’occupe de ses huit enfants, sept filles et un garçon.


Enfance et famille

À l’âge de cinq ans, Geneviève entre à l’école catholique tenue par des religieuses. Sa grande sœur Yvonne l’initie à « La Croisade eucharistique », mouvement implanté à l’époque dans toute la France et qui a joué un rôle important pour la formation chrétienne des enfants d’âge scolaire. A 7 ans elle fait sa première communion suivie la même année par sa confirmation.

À douze ans elle est pensionnaire à Angers, à Bellefontaine chez les Religieuses de Chavagnes où sa mère et toutes ses sœurs l’ont précédée. A 16 ans après avoir réussi son brevet, elle rentre à Saint Florent pour prendre sa part des charges familiales. A la naissance de chaque neveu, elle est appelée pour aider les jeunes mamans, elle devient experte dans l’art de s’occuper des nouveaux nés.

Elle prend aussi une part active à la vie paroissiale : chorale, groupe de théâtre.

Le premier neveu de Geneviève est né lorsqu’elle avait 5 ans, ils sont ensuite très nombreux à voir le jour et la famille s’agrandit rapidement. Elle garde toujours avec eux un lien privilégié et très proche. Lors de son anniversaire de 90 ans ils lui ont organisé en secret une fête grandiose où plus de 100 personnes de la famille se sont réunies. Elle le raconte dans une lettre datée du 22 juillet 2009:

« Nous arrivions au Marillais… là une foule. Alors j’ai tout compris en voyant les visages de neveux, petits neveux venant de tous les coins de France : Paris, les Pyrénées, Toulouse, Bordeaux, Roubaix, mais aussi Nantes, Angers, la Normandie, la Bretagne… et de tous les âges. Dans cette foule trois neveux prêtres de la Région Parisienne et d’Angers. […] Cérémonie religieuse avec les neveux prêtres et une direction des chants assurée par un neveu Vietnamien qui fait partie d’une chorale à Nantes. […] À la fin du déjeuner présentation d’une comédie par deux neveux. Ce n’était pas triste.»

Avec cinq sœurs mariées et un frère, elle a eu 52 neveux. Établi en 2003, un « Morinnuaire » recense plus de 750 descendants directs (avec conjoints « rapportés ») de Victor Morinière et sa femme Madeleine.

Engagement dans la foi 

À dix-huit ans, le Vicaire de la paroisse, l’abbé Héon, la sollicite pour créer un groupe « d’Âmes Vaillantes », le pendant pour les filles des groupes « Cœurs Vaillants » des garçons. Ce mouvement, suscité par les « Fils de la Charité », mettait en œuvre une pédagogie avancée qui donnait une grande place aux jeux éducatifs. Ce mouvement connut un grand développement, y participaient autant les enfants de l’école publique que ceux de l’école « libre ».

Avec des anciennes camarades de Bellefontaine elle participe à la création d’une équipe de « Jeunesse Independante Chrétienne Feminine » (JICF) à Saint Florent.

À la déclaration de la guerre, en aout 39, se produit l’arrivée massive des refugiés venant de Paris, du Nord de la France et de Belgique, ils sont accueillis à Saint Florent après avoir passé la Loire. Geneviève, avec sa sœur Renée de 5 ans son ainée, prend une part active à leur accueil, ainsi qu’a celui de ses sœurs qui se refugient dans la maison familiale avec leurs nombreux enfants.

En février 1941 lors d’une retraite destinée à des JICistes qui va la marquer profondément, elle se sent interpellée par l’évangile du « Jeune Homme Riche » et l’appel qui lui adresse Jésus. Elle fait part à ses parents de son désir de « vie consacrée ». Sa mère lui suggère de voir Marie-Renée Chéné engagée à la congrégation Notre Dame du Travail (NDT) ; Marie- Renée Chéné était apparentée à la famille Morinière car son frère Robert avait épousé une sœur de Geneviève Morinière, Germaine. Après différentes démarches et contacts, Geneviève cherche à mieux connaitre les engagements de Marie-Renée à NDT et elle prend contact à Paris avec les responsables de cette congrégation. Après un temps de réflexion, de prière et de conseils éclairés, elle opte pour s’engager à Notre Dame du Travail.

En décembre 1942, pour suivre cet appel, elle quitte Saint Florent et durant deux ans, elle suit une formation essentiellement d’ordre religieux fortement marquée par la spiritualité de Saint Ignace (fondateur des Jésuites). Une vie fraternelle avec les sept autres jeunes filles qui ont fait le même choix qu’elle, atténue un peu l’austérité d’un mode de vie, à Paris, si différent de celui dont elle a bénéficié jusqu’alors.

Cette étape franchie, Geneviève doit acquérir la compétence professionnelle qui lui permettra d’exercer la « vocation sociale » qui est la sienne.

Parcours professionnel

On peut situer les débuts de son engagement professionnel à la mise en place, au début de la deuxième guerre mondiale, du « Secours National », organisation qui va tout d’abord s’occuper des évacués et des réfugiés avant de coordonner l’essentiel de l’action sociale. Le Maire de Saint Florent demande à la famille Morinière si leurs filles accepteraient d’exercer un rôle « d’auxiliaire sociale ». Geneviève donne son accord mais souhaite acquérir une formation adaptée qu’elle juge indispensable. Elle s’inscrit à Nantes, dans une première session de deux ou trois mois en 1940 et une deuxième en 1941. Cette formation est assurée par trois membres de l’École Normale Sociale (ENS), dont la directrice Hélène Naegelen. Cette école de Paris, dont les monitrices étaient réfugiées, elles aussi,, créaient une nouvelle École Normale Sociale à Angers. Marie-Renée Chéné y participait en tant que formatrice.

Quelques années plus tard, au sortir de sa formation spirituelle à Paris, c’est tout logiquement qu’elle entre à l’ENS pour y suivre, en 1945, une formation d’infirmière puis d’assistante sociale. Elle obtient le diplôme d’infirmière en 1948 et celui d’assistante sociale en 1950.

Sa vie professionnelle débute à Belleville dans un Centre Social situé en plein quartier populaire. Elle est particulièrement sensible à la grande pauvreté d’une large part de la population. Cette expérience est pour elle riche et épanouissante et on peut, peut –être, y trouver son intérêt naissant pour les approches collectives et le travail social communautaire.

Deux ans après, en 1952, Geneviève intègre l’équipe pédagogique de l’Ecole Normale Sociale, alors située Rue de Rennes. C’est un grand changement, mais elle s’intéresse très vite à ses nouvelles fonctions, rôle auprès des élèves, collaboration avec les collègues enseignantes, mise en place d’innovations pédagogiques telles que les « études de quartier » qui connaitront par la suite un grand développement. Elle suivra d’abord une sensibilisation et ensuite une formation (1958-1961) au Casework organisée par le Comité d’Entente des écoles de service social ayant Myriam David comme principale formatrice en psychologie dynamique.

En 1959, l’ENS déménage dans le 11ème arrondissement de Paris, Boulevard de Charonne. La directrice, Hélène Naegelen, s’investit beaucoup dans la réalisation matérielle des nouveaux locaux et du foyer attenant qui accueille les élèves. De ce fait, Geneviève est amenée à prendre de plus en plus de responsabilités.

Pour se préparer à de nouvelles fonctions au sein de l’école, elle suit, en 1960 – 1961, la formation de Cadres à l’Institut de Service social de Montrouge. À l’issue de sa formation, en 1962, elle est nommée directrice de l’École Normale Sociale. Où elle restera jusqu’à sa retraite en 1981.

Après 1968, Geneviève Morinière a renouvelé son équipe de cadres pédagogiques permanents avec l’embauche de plusieurs jeunes professionnelles formées aux méthodes de service social, et a ainsi donné une nouvelle dynamique à l’école. De ce groupe, formé par elle, sont issues trois directrices de centres de formation (Mulhouse, Toulon, Lyon), et deux directrices d’établissements associatifs (Service social d’aide aux émigrants, Centre d’hébergement et réinsertion sociale).

Après sa retraite Geneviève Morinière déménage à Nantes pour se rapprocher de ses neveux et nièces. Elle poursuit alors une vie très active auprès d’associations dans le domaine social. Comme elle l’écrit dans une lettre datée du 31mars 1984 :

« Pour ma part mes activités à Nantes sont les suivantes :

• Participation à une Association de Solidarité avec les Travailleurs Immigrés (ASTI) : étude statistique des Migrants dans l’agglomération Nantaise et projet, avec ce groupe élargi à des médecins, assistante sociale SSAE, infirmières, de mettre sur pied un service d’interprétariat dans les Hôpitaux avec de gens de la culture d’origine : Arabe, turque, portugaise… Je suis dans la sous-commission des relations avec l’extérieur
• Commission « Santé » de Culture et liberté, je suis dans la sous-commission documentation
• Secrétariat de l’Association Française des Centres de Conseillers Conjugaux, où travaille ma belle-sœur
• J’ai accepté une participation pédagogique au Centre de Formation Continue en Travail social (CFCTS) depuis octobre : jusqu’ici jurys de mémoires de fin de formation aux méthodes, deux fois 2 jours sur « sensibilisation à l’action sociale communautaire » et supervision….. »

En mai-juin 1985 Geneviève Morinière se prépare pour un voyage dans l’Ile de la Réunion. Elle a été sollicitée par la conseillère technique et pédagogique du Ministère des Affaires sociales pour soutenir la directrice et l’équipe de cadres pédagogiques dans la mise en place d’une école de service social dans ce département. Geneviève Morinière était en relation avec ce département d’outre mer depuis plusieurs année car l’ENS recevait des étudiants boursiers pour effectuer leur formation en Métropole. Pour préparer cette mission d’expert technique elle mobilise tout son réseau : les directrices de centres de formation anciens cadres pédagogiques de son équipe à qui elle demande des documents, des informations pédagogiques, des mémoires, des situations d’examen, etc. Avec la minutie et le sérieux qui la caractérise elle prépare son dossier afin d’apporter le maximum d’éléments à l’équipe qui se met en place. Dans sa lettre du 15 juin 1985 elle détaille :

« Je pars donc ce 25 juin avec, entre autres choses 4 dossiers et leurs sous-dossiers bien classés qui m’aideront à ne pas me « planter » j’espère…
• Un vert : La réunion (démo, géo, histoire, Eco, Administration y compris les noms des hommes politiques de l’heure) ;
• Un bleu : L’école : programme des cours, projet pédagogique, cv et origine géographique des étudiants ; 2 rapports à dimension collective de là-bas…
• Un rouge : pédagogie (le plus important) Travail social. C’st là que se trouvent vos documents et les fiches sur votre livre…
• Un jaune : textes officiels DE etc. »

Elle a reçu une Décoration officielle, les PALMES ACADEMIQUES par décret du 21 juillet 1987.

En 2009, à l’âge de 90 ans, Geneviève Morinière décide d’intégrer une maison de retraite, comme elle l’explique dans une lettre du 13 juillet 2009 :
« Peut-être vous êtes-vous étonnée de ma décision d’entrer en maison de retraite. C’est que je ne voulais pas donner de soucis à mes neveux et nièces, très nombreux, vous le savez, même à Nantes, mais « grands parents », « arrières » et même « arrières et arrières grands parents ».

Sa contribution au service social

Avec une vie engagée dédiée à l’enseignement du service social, Geneviève y a fait deux contributions essentielles :

• Elle a été pionnière dans la promotion du travail social communautaire, la prise en considération des actions collectives et du développement social ;
• Son implication constante auprès de personnes étrangères a qui elle a su offrir solidarité mais aussi réalisations et perspectives, notamment la création de la formation d’adaptation pour des titulaires d’un diplôme assistant de service social étranger.

Le travail social communautaire

On peut trouver les origines de son intérêt pour le travail social communautaire dans son premier poste de travail dans un centre social dans le quartier populaire de Belleville, mais c’est sa formation de Cadre qui va renforcer encore cette orientation. Elle s’interroge dans un article publié par la Revue Française de Service Social 2e et 3e trimestre 1994:

« Étaient-ce mes origines rurales qui m’avaient sensibilisée ? Ou bien les origines d’action sociale de l’École Normale Sociale, son ouverture au plan international ou son implantation dans un quartier populaire, les liens que nous avions créés avec les forces vives de son environnement à partir des études faites, avec les étudiants, sur le quartier du 11ᵉ quatre années de suite ? »

En 1961 – 1962 elle passe une « année sabbatique » dans la formation de Cadres de l’Institut de Service Social de Montrouge, au cours de laquelle elle effectue deux stages, l’une à la CAF au Centre social de Sarcelles, l’autre à Mourenx-Ville –Nouvelle (Pyrénées-Atlantiques). C’est à partir de cette dernière qu’elle écrira son mémoire intitulé « Analyse du travail de deux assistantes sociales dans les grands ensembles » effectué à partir du dépouillement des carnets de bord des professionnelles, sur un an. De plus elle participera, en mai 1962, au Séminaire européen, au Portugal, sur « Développement communautaire et service social ». Cette formation sera déterminante pour la suite et dès l’année suivante, elle la réinvestira dans la formation des élèves à l’ENS.

Alors que le nouveau programme d’études du service social de 1962 renforce l’enseignement aux méthodes du service social et introduit notamment le service social de groupe et communautaire, l’ENS a déjà un réel acquis dans ce domaine qu’elle continuera alors à développer.

Dès l’année suivante Geneviève Morinière met en place avec l’Institut de Service social de Montrouge un séminaire de trois jours (en IIIᵉ année) sur le travail social communautaire. Ce séminaire s’organise avec une pédagogie active, s’appuie sur les stages en cours des étudiants, souhaitant partir de leur réalité de terrain. Ils seront organisés trois années de suite et la troisième année on inclura aussi une journée d’information ouverte aux formateurs de stage. Après 1966 et pendant encore 5 ans l’ENS poursuivra seule les séminaires mettant en place un enseignement pluridisciplinaire et en lien direct avec les réalités du Service social.

Un nouvel élan est donné par la Formation des responsables des centres sociaux organisée par l’Union Nationale des Caisses d’Allocations Familiales (UNCAF) qui se tient dans les locaux de l’ENS. C’est une formation importante, en cours d’emploi, qui se déroule sur deux années à raison de 2 jours par mois. Une équipe pluridisciplinaire se met en œuvre avec des sociologues, assistantes sociales et un enseignant principal hollandais, M. GRAFF. Geneviève Morinière participe activement en tant que superviseur, elle peut ainsi encore tisser des liens privilégiés avec les acteurs directs de cette dimension collective.

Début 1968, au Séminaire de Sèvres sur le Travail social communautaire organisé par l’UNCAF, Geneviève Morinière est directrice pédagogique, conjointement avec M. Graff, elle fait un exposé sur l’enseignement du TS communautaire en France. Ce séminaire a constitué une étape importante dans l’introduction du TSC en France et à partir de ce moment, l’École Normale Social et sa directrice, acquièrent une image de marque qui lui permettra de développer les formations permanentes à cette méthode.

Dès 1969, à la tête d’une équipe pédagogique renouvelée, jeune et dynamique, elle développe notablement la formation des étudiants aux méthodes de service social de groupe et communautaire car l’embauche de deux cadres pédagogiques permanents (CPP) spécialisés dans ces approches ouvre de nouvelles perspectives. Progressivement l’enseignement des trois méthodes (individuel, groupe et communautaire) prend plus d’heures de formation et les trois approches s’équilibrent. L’enseignement du service social devient une priorité et se met en place avec une pédagogie active, sous forme de travail en petits groupes par méthodes, avec la participation de AS praticiennes vacataires en plus des CPP.

En novembre 1969 l’ENS ouvre un « perfectionnement en cours d’emploi » sur le thème « Service social et problèmes collectifs » à raison de 2 jours par mois sur deux ans. L’année suivante un nouveau groupe se met en place.

Dans cet apport essentiel que Geneviève Morinière a légué au service social on peut retrouver son dynamisme et sa capacité à s’interroger et à chercher, sans dogmatismes, avec une grande ouverture aux autres. Comme elle le dit dans son exposé d’introduction au « Perfectionnement en cours d’emploi Service social et problèmes collectifs » le 14 novembre 1969:

« Il nous semblait préférable de forger presque entièrement des outils de travail pour définir une méthode en partant de la réalité, plutôt que de conceptualiser d’abord cette méthode, de l’emprunter à un autre pays où elle serait sans doute déjà expérimentée, mais où le contexte socio-économique, la place et surtout le statut du service social ne serait pas le même. Était-ce la bonne route ? Nous allions cheminer des années avec cette incertitude… »

C’est cette démarche de recherche en partant de la réalité complexe des pratiques pour peu à peu élaborer une approche théorique utile et utilisable qui caractérise la dynamique qu’elle a su impulser dans son école et auprès de son équipe.

Implication auprès des étrangers : la formation d’adaptation

Un autre apport considérable au service social a été la création d’une formation spécifique pour les assistants de service social étrangers, diplômés dans leur pays d’origine.

L’ENS avait depuis longtemps une grande ouverture vers l’international et recevait des élèves de différents pays. Dans la période 1948 – 1959 on relève des élèves nombreux en provenance d’Asie (Inde, Viêt Nam, Afghanistan) ou d’Afrique (Sénégal, Madagascar, Tunisie, Soudan, Guinée).

Geneviève Morinière, très ouverte aux autres et s’enrichissant des différences, a toujours accueilli favorablement les étrangers qu’elle considérait comme un apport pour le service social. Sous sa direction, elle organise des formations spécialement conçues pour des assistantes sociales étrangères diplômées dans leur pays d’origine. Après évaluation la professionnelle faisait un cursus personnalisé d’études, en général d’un an, et était présentée au Diplôme d’état de service social avec la promotion IIIe année de l’ENS. Entre 1969 et 1974 sept professionnelles ont ainsi obtenu le DEAS les autorisant à exercer en France (2 latino-américaines, 5 européennes).

Après les coups d’État en Uruguay et Chili (1973) et en Argentine (1976) les réfugiés latino américains affluent en France par vagues successives, parmi eux un certain nombre de assistants de service social. Devant le nombre, les difficultés rencontrées et l’impossibilité d’exercer leur profession en France, Geneviève Morinière les accueille et réfléchit avec elles et son équipe à comment trouver une solution pour soit faire reconnaitre leur diplôme, soit leur aménager officiellement un cursus spécifique de formation aboutissant à l’obtention du Diplôme d’État français.

Une grande mobilisation solidaire s’organise autour de ces réfugiées et Geneviève Morinière mobilise tous ses réseaux et contacts pour étudier les différentes possibilités. En attendant un aboutissement elle organise avec son équipe une formation et mobilise les services sociaux pour obtenir des stages rémunérés pour ces personnes. Ce programme se déroule au cours de l’année scolaire 1974-1975, sans aucune certitude quant aux modalités de certification.

Ce n’est pas sans mal que le 12 janvier 1976 le décret n° 76-53 et l’arrêté du 19 janvier 1976 voient le jour et officialisent une formation d’adaptation avec un cursus spécifique pour les assistants de service social ayant un diplôme étranger. Après la parution des textes, dès septembre 1976, d’autres écoles ouvriront aussi des groupes de formation d’adaptation pour les diplômés étrangers. L’ENS poursuivra, jusqu’à aujourd’hui, cette formation pour les AS étrangers dont Geneviève Morinière a été l’artisan.
Geneviève Morinière prolongera cet engagement auprès des étrangers après sa retraite et participera à la création, en 1984, de l’Association santé migrants de Loire-Atlantique (ASMALA) à Nantes. Très investie dans cette association elle sera un membre actif pendant de nombreuses années et assurera la présidence pendant deux mandats. Jusqu’à son décès, elle figurera comme Présidente d’honneur de l’association.

BIBLIOGRAPHIE : Geneviève Morinière, « Peut-on parler aujourd’hui en France de formation au travail social de communauté ? », Informations sociales, « Le travail social de communauté », n° 4-5, avril-mai 1968. — Geneviève Morinière, « Réalités actuelles de l’enseignement du service social en France », Vie sociale, n° 3, mars 1969. — Geneviève Morinière, « Le travail social de communauté. Son enseignement dans les centres de formation au service social Une expérience pionnière à l’École Normale Sociale », Revue française de service social, n° 173-174, 2e et 3e trimestre 1994.

SOURCES : Henri Pascal, « Des syndicats féminins au service social : l’Ecole Normale Sociale » rapport de recherche CNRS/Université de Provence Aix en Provence 1983 173 p. + annexes. — Cristina De Robertis, « Origine de la formation d’adaptation des assistants de service social étrangers en France (1973-1976). Une solidarité instituante » dans Les Temps du social, n° 11, publications du GREHSS Juin 2009, http://www.grehss.fr — Le parcours de Geneviève Morinière – 2 notes prises par des neveux sous sa dictée (sans date). — Curriculum vitae établi par G. Morinière s/d, reçu en février 2009. — Correspondance personnelle avec Henri Pascal et Cristina De Robertis. — Archives personnelles.

Cristina De Robertis